Salariat déguisé : tout ce que vous devez savoir
L’auto-entreprise (ou micro-entreprise) a la particularité d’offrir au professionnel qui a opté pour son régime simplifié, une relative liberté dans l’exercice de son activité freelance. Vous êtes en effet le seul maître à bord et gérez votre entreprise en toute indépendance. Pourtant, il arrive parfois qu’un auto-entrepreneur, volontairement ou sans le savoir, vienne à exécuter ses prestations dans des situations et conditions identiques à celles d’un employé/salarié ordinaire. On parle alors de salariat déguisé. A quoi renvoie cette notion ? Comment savoir si vous êtes en situation de salariat déguisé ? Quelles conséquences risquez-vous dans cette situation jugée légalement irrégulière ? Comment vous prémunir d’une telle situation ? Dans cet article, retrouvez toutes les réponses aux questions liées au salariat déguisé.

Définition du salariat déguisé
Le salariat déguisé désigne une situation dans laquelle un auto-entrepreneur ou travailleur indépendant accepte ou exécute ses missions/prestations dans des conditions similaires à celles d’un salarié ou employé ordinaire. Il travaille de fait comme un salarié, sous la subordination d’un autre professionnel agissant comme client ou donneur d’ordre, bottant en touche l’autonomie que lui confère son statut de micro-entrepreneur.
Les critères de reconnaissance d’une situation de salariat déguisé
La situation de salariat déguisé n’est pas très simple à établir et il n’est pas rare que des auto-entrepreneurs s’y trouvent impliqués sans même le savoir. Celle-ci s’apprécie globalement par rapport à deux critères. Le premier est d’ordre juridique et s'appuie sur l’existence d’un lien de subordination (implicite) entre l’auto-entrepreneur et son client. Le second quant à lui est d’ordre économique et découle par exemple du fait que l’auto-entrepreneur vend ses prestations à un seul client et peine à diversifier sa clientèle.
Pour établir qu’elle est en présence d’une situation de salariat déguisé, la jurisprudence s’attèle à rechercher en priorité le lien de subordination. Autrement dit, selon le code du travail, que l’auto-entrepreneur exécute son travail sous l’autorité, la direction et le pouvoir (de sanction) d’un employeur (confère arrêt Cass. Soc. 13 novembre 1996, n°94-13187).
Pour renforcer leur conviction, les autorités de contrôles évaluent ensuite certains aspects factuels de la collaboration en quête d’indices supplémentaires pour apprécier la perte d’autonomie de l'entrepreneuriat (contrat de prestation unique, subordination juridique, etc.) et ainsi conclure au salariat déguisé. Ainsi, l’on vérifie au cas par cas, si :
- L’autoentrepreneur est soumis à l’agenda et aux horaires de son client ou donneur d’ordre
- Il travail dans les locaux ou un lieu imposé par son client
- L’auto-entrepreneur utilise le matériel de l’entreprise, reçoit des ordres, des instruction ou sanctions du client
- Il y a une forte dépendance économique : l’activité est exercée de manière permanente pour un seul client
- Etc.
Salariat déguisé : les risques et conséquences encourus
Qu’il soit volontaire ou inconscient, le salariat déguisé peut avoir de lourdes conséquences aussi bien pour le client donneur d’ordre que pour l’auto-entrepreneur qui n'effectue plus un travail indépendant.
Les risques et conséquences pour le donneur d’ordre
Les risques les plus graves pèsent davantage sur l’entreprise cliente. En effet, en cas de salariat déguisé l’entreprise impliquée est considérée comme un employeur et risque une requalification des prestations du micro-entrepreneur en contrat de travail. Ce qui entraîne comme conséquences au plan civil et fiscal :
- Une condamnation à verser les salaires et indemnités calculés sur une période équivalente à celle du travail déguisé
- Le paiement, en cas de rupture du contrat, des indemnités de licenciement ainsi que des dommages et intérêts
- Un redressement par l’URSSAF, sur le calcul de vos charges sociales sur la base du poste équivalent
- Une privation des aides à l’emploi et l’interdiction d’accéder aux marchés publics sur 5 ans
Au plan pénal, le responsable de l’entreprise risque une peine d’emprisonnement de 3 ans et une amende de 45.000 € pour dissimulation d’emploi salarié (cf. article L8221-5 du Code du travail). En cas de récidive, vous risquez le double de la peine.
Les risques et conséquences pour l’auto-entrepreneur
S’il échappe aux poursuites judiciaires, l’auto-entrepreneur en salariat déguisé n’est pour autant pas à l’abri des conséquences pouvant résulter de la perte de son indépendance. En effet, sa dépendance économique constitue un grand obstacle au développement de son portefeuille client et par ricochet à celui de son entreprise. Avec un chiffre d’affaires provenant d’un client unique, la faillite n’est pas loin en cas de rupture de collaboration.
De même, vous ne bénéficiez pas pleinement du traitement et de la protection sociale normalement due pour un statut de salarié dans votre situation. Enfin, vous n’êtes pas à l’abri d’une éventuelle régularisation opérée par les services de la sécurité sociale, puisque vous pouvez être contraint à rembourser certaines prestations et allocations chômages versées durant la période du salariat déguisé.
Quelles voies de recours en cas de poursuite ?
L’idéal pour éviter d'être en situation de salariat déguisé et subir ses conséquences est de vous prémunir en conservant la liberté et l’autonomie liées à votre statut d’auto-entrepreneur. Vous pouvez le faire en auto-évaluant vos collaborations avec vos clients à l’aune des critères et indices relevés plus haut et ainsi vous assurer que vous n’êtes pas en situation de subordination.
Cela dit, si vous vous retrouvez en situation de salariat déguisé présumé (travail dissimulé), soit comme donneur d’ordre ou comme auto-entrepreneur (prestataire), vous êtes autorisé à vous défendre et démontrer le contraire dans le cadre d’un recours devant le Conseil de Prud’hommes de votre département.
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